J'ai dit très clairement, quand on ne sera plus là, qu'ils seraient volontaires pour que Hussein ne puisse avoir un foyer.

C'était quand même une réunion pas facile, je l'avais distribué des documents en amont.

Je leur ai ensuite remis des textes sur ce que c'est que le mandat de protection pour autrui, en attente de la réunion.

J'ai dans un premier temps répondu à leurs questions et dans un deuxième temps posé mes questions.

Il y a eu des personnes qui se sont quand même portées volontaires, mais je pense, sur le moment, en fait, par principe, au fil du temps, je me rends compte que ce serait compliqué d'avoir notre fils au quotidien pour elle, parce que déjà, même maintenant, il y a peu d'intérêt pour lui.

J'ai exploré d'autres pistes.

La piste de l'habitat inclusif, qui serait une alternative à l'institution et donc aussi une alternative à la famille.

Ça fait partie aussi des réponses qu'on doit avoir pour aussi se dire, bon, voilà, il va quand même y avoir des solutions quand je ne serai plus là.

Je me dis, voilà, au moins, j'ai préparé quelque chose.

Je confie à mon enfant avec des consignes, je ne pars pas comme ça.

Dans le témoignage que vous venez d'écouter, Aïcha évoque une réunion organisée avec sa famille autour de l'avenir de son fils Hussein, atteint du syndrome d'Angelman.

Comme Aïcha le fait dans ce témoignage et tout au long de cet épisode de La Voix des Aidants, nous allons nous demander comment réparer le futur de son enfant en situation de handicap après le décès de l'aidant.

Le sujet est difficile à aborder et demande beaucoup de communication et d'anticipation.

Je suis Yoram Meloul, le médiateur de ce podcast.

Et pour parler de la thématique du jour, je ne suis bien sûr pas seul.

J'ai avec moi Camille de Sauras.

Bonjour, Camille.

Bonjour.

Tu es conseillère en gestion de patrimoine chez Gemini Conseil, un cabinet de conseils spécialisé auprès des personnes en situation de handicap et auprès de leur famille.

Avec moi également Lara Herman.

Bonjour, Lara.

Tu es la mère de deux jeunes hommes dont l'aîné de 22 ans est porteur du syndrome d'Angelman.

Tu te décris toi-même comme, je te cite, une aidante familiale full time.

Mais ce n'est pas tout.

Tu es aussi bénévole de l'Association française du syndrome d'Angelman, l'AFSA, dont tu es la vice-présidente et dont Aïcha, que nous avons entendu au début de l'épisode, est également membre.

Alors, pour mieux comprendre ta présence aujourd'hui sur ce sujet, Lara, j'aimerais que tu nous expliques ce qu'est le syndrome d'Angelman.

Bonjour à tous encore une fois.

Alors, le syndrome d'Angelman est une maladie génétique rare du spectre des troubles du neurodéveloppement.

Il touche environ une naissance sur 10 à 20 000.

Donc, c'est plutôt une maladie rare, voilà, pas rarissime, mais rare.

Et parmi les symptômes qui le caractérisent, il y a une déficience intellectuelle importante, des troubles moteurs, une épilepsie qui peut être plus ou moins sévère, l'absence de parole, des troubles du sommeil, une hyperactivité de ces personnes tout au long de leur vie, des symptômes assez complexes à gérer au quotidien.

L'avenir de ton fils après ton décès, c'est un sujet auquel tu penses depuis quand? Alors, je n'y pense pas tous les jours.

J'ai rassuré les auditeurs, mais j'y pense quand même.

C'est toujours un peu présent dans un coin de ma tête.

Et l'idée, cette idée, cette thématique, disons comme ça, a émergé assez vite.

Lorsqu'Alex, mon fils Alex, était petit, parce que la gestion au quotidien de son handicap et de ses difficultés est tellement complexe qu'on ne peut pas ne pas aborder l'idée à qui confier cette personne et toute sa prise en charge, tout son accompagnement quand nous, papa et maman, on ne sera plus là.

C'est déjà très complexe pour nous.

Donc, cette idée d'avoir quelqu'un de confiance auprès de qui notre fils pourra s'épanouir et vivre sa vie de jeune adulte, d'adulte, est là.

Oui, c'est ce que c'est, ce que j'avais demandé.

Qu'est ce qui est, qu'est ce qui ressort quand tu penses à ça? Quelle est la question principale ou les questions principales qui te viennent à l'esprit? Donc, la question de la personne de confiance, j'imagine que ce n'est pas tout.

Non, ce n'est pas tout.

C'est qu'en fait, nous, les parents, nous nous sentons porter une mission, celle d'accompagner notre enfant, qu'il soit un porteur d'handicap ou pas.

D'ailleurs, tout au long de sa vie, pour son épanouissement, pour qu'il vole après de ses propres ailes.

Eh bien, Alex n'a pas d'aile assez forte et grande pour voler de ses propres ailes, pour être indépendant quand il sera adulte.

Il l'est déjà par ailleurs.

Il est majeur.

Et donc, la question est qui choisira? Parce que nous, les parents, on ne l'a pas choisi, que notre enfant soit porteur d'handicap.

Mais on assume cette charge avec, avec amour, bien entendu, avec conscience, en toute conscience, je l'espère.

Mais on ne l'a pas choisi.

Tandis que qui choisira de sa propre initiative, de sa propre volonté et avec amour d'accompagner Alex jusqu'à son dernier jour? C'est un peu ça, en fait, la question centrale.

Nous, on ne l'a pas choisi, mais qui le choisira? Le choisira parce que c'est un membre de la famille ou le choisira parce que c'est son métier? Là, c'est encore un autre, un autre sujet à aborder.

C'est le thème central.

C'est le choix.

Et c'est un sujet dont vous discutez au sein de l'AFSA assez souvent.

Ça fait partie des sujets que nous abordons parce que les familles en sont demandeuses.

Et donc, notamment lorsqu'on se réunit une fois tous les deux ans pour les rencontres nationales de l'AFSA, le thème du futur est abordé.

Et nous avons effectivement déjà fait appel à des notaires, à des gestionnaires de patrimoine pour venir éclairer les familles et pouvoir apporter des réponses à ces questions.

Alors, tu évoques les gestionnaires de patrimoine.

On en a une avec nous, justement, Camille.

Qu'est ce que c'est une gestionnaire de patrimoine? Rapidement, à quoi ça sert? Alors, on conseille les familles sur l'organisation du patrimoine, la transmission du patrimoine.

Donc, en l'occurrence, dans le cas présent, quel est le patrimoine adapté pour une personne en situation de handicap? Est ce que compte tenu de son handicap spécifique à lui et par conséquence, comment est ce qu'on va organiser la transmission du patrimoine des parents pour que cet enfant ait le patrimoine adapté? Et quels sont les profils un peu, si j'ose dire, de familles qui viennent te voir, qui s'adressent à toi? Il n'y a aucun profil type.

Les familles sont extrêmement variées, venant de toute classe sociale, tous horizons.

Ça concerne tout le monde, finalement, cette organisation du futur, quel que soit le patrimoine.

Oui, c'est ce que j'allais dire.

On peut venir te voir même si on a un petit patrimoine et qu'on réfléchit au futur, à la suite.

Oui, tout à fait, quel que soit le patrimoine.

Est ce que toi, parmi les personnes que tu vois, tu identifies un âge déclic, un moment de leur vie qui fait qu'ils se disent là, il faut que j'aille consulter une personne qui va me conseiller.

Oui, on voit souvent les personnes venir nous voir dès lors que l'enfant approche les 18 ans parce qu'il va devenir majeur et donc il sera responsable, sauf s'il ne peut pas.

Et dans ces cas là, il sera sous protection juridique.

Et à partir de 20 ans, il va aussi avoir une ressource qui est l'allocation adulte handicapé, l'AAH.

Et donc, à partir de là, il va falloir organiser son patrimoine pour qu'il soit bien adapté à cette source de revenus, puisqu'elle dépend des revenus imposables.

Donc, si les parents ont prévu de donner des revenus complémentaires tels qu'un loyer, par exemple, ça ne va pas aller dans l'objectif poursuivi.

Après, entre 18, 20 et quelques, va se poser la question du mode de vie.

Donc, certains enfants vont, par exemple, aller en foyer.

Là aussi, ça va avoir un impact sur les décisions à prendre concernant le patrimoine.

Donc, c'est vrai qu'il y a ce passage à la majorité qui fait qu'on vient nous voir à ce moment-là.

Mais finalement, on voit des familles arriver à tout moment de la vie, et notamment quand les parents qui s'occupent de leur enfant sont vieillissants.

Justement parce qu'ils commencent à réfléchir, s'ils ne l'ont pas fait avant, à la suite, en se disant qui va se charger de mon enfant dont je m'occupe.

Ou que ce soit sur les questions administratives ou sur la prise en charge au quotidien.

Et là, ça se passe comment ? Un rendez-vous avec toi, qu'est-ce que tu leur dis ? Les personnes qui nous écoutent, si elles venaient te voir, quelles questions tu leur poserais tout de suite ? Alors, la question, ça va être comment envisagez-vous la vie de votre enfant quand vous ne serez plus là ? Est-ce qu'il est déjà en foyer ? Est-ce qu'il va aller en foyer ? Est-ce qu'il va être pris en charge par quelqu'un ? Aller en habitat inclusif ? Est-ce qu'il vit de façon autonome ? Ça, c'est vraiment une question clé parce que ça va avoir un impact sur l'organisation du patrimoine.

Est-ce qu'il a des ressources provenant du travail ou d'aide sociale ou du patrimoine ? Là aussi, ça va impacter les décisions à prendre.

Est-ce qu'il a des frères et sœurs ou des proches de la famille qui vont s'occuper de lui ? Est-ce qu'il est sous protection juridique ? S'il ne l'est pas, est-ce qu'en réalité, il a besoin ? Du coup, toutes ces réponses vont orienter vers notre conseil.

L'objectif étant que tout soit organisé pour que les parents puissent être sereins et se dire si je ne suis plus là ou si je perds mes capacités.

En fait, on parle beaucoup depuis le début de décès.

Mais il y a aussi anticipé un moment où les parents ne pourront plus s'occuper de lui autant sur le plan des papiers que la prise en charge chez eux, par exemple.

Oui, en fait, tu fais bien de le dire.

Ce qui compte ici, c'est l'anticipation.

Et j'imagine aussi beaucoup de communication.

On va en reparler.

Lara, toi, tu as été voir un conseiller, une conseillère en gestion de patrimoine ? Alors, nous sommes en train de faire la démarche.

Parce que voilà, effectivement, Camille l'a dit très bien.

Il y a des âges charnières.

Et ces âges charnières sont entre les 18 et les 20 ans, quand on commence à se préoccuper, disons, du futur.

Je réfléchissais en écoutant Camille.

Il y a bien sûr l'aspect matériel qui est très important.

Parce qu'en fait, on ne veut surtout pas que notre enfant manque de quelque chose quand on ne sera plus là.

Si on est là, bien sûr, l'AH, je ne rentre pas dans la polémique du montant de l'AH, mais l'AH permet certes une toute petite autonomie.

Mais si on veut acheter des choses pour faire plaisir ou offrir des vacances, des loisirs un peu plus chers à notre enfant, en situation de handicap, on est là et on le fait.

Voilà, si on le peut, bien entendu.

Parce qu'on veut surtout qu'il soit épanoui, qu'il soit heureux et qu'il puisse avoir des satisfactions dans la vie, comme tout autre jeune homme de son âge.

Mais il faut qu'au moins le côté matériel, papier, comme disait Camille, et économique soient déjà bien rangés dans des cases, disons comme ça.

Au moins, on évacue ces sujets d'inquiétude dans notre tête.

Voilà, on vide un peu la tête, on allège un peu la charge mentale qu'on a.

Et après, il y a toute l'autre partie, j'oserais dire, ou les autres parties, ça dépend de comment on est organisé.

C'est-à-dire, une fois qu'on sait qu'il ne manquera de rien, est-ce qu'il sera heureux là où il vivra ? Est-ce que s'il est en foyer, s'il est en maison d'accueil spécialisée, s'il est un habitant inclusif, s'il est chez lui, s'il est plus autonome et donc il pourra avoir un chez lui, est-ce qu'il aura une vie heureuse ? Est-ce qu'il y aura des personnes qui viendront lui rendre visite et le sortiront s'il est à une institution ? Est-ce qu'il pourra aller, je ne sais pas, de temps en temps au musée, au cinéma, dans un parc d'attractions, ou bien s'offrir une semaine de vacances ? Et avec qui il partira ? C'est toute la partie qui met des étoiles dans la vie qui nous préoccupe.

Et comment tu prépares ça ? Donne-moi une baguette magique et je vais te répondre et je vais tout faire comme il faut pour aligner les planètes.

J'entends, mais il y a la question de la communication par exemple, de savoir anticiper qui sera là.

Est-ce que dans ta famille vous en parlez ? Non, on n'en parle pas.

C'est-à-dire, on en parle mon mari et moi, bien entendu.

Et donc de ce côté-là, le dernier d'entre nous qui pourra s'occuper d'Alex et aller le voir, etc.

, le dernier survivant, en disant comme ça, je n'en ai pas de doute là-dessus.

Quand tu l'as dit au début, quand tu m'as présenté, Alex a un frère qui est majeur maintenant et avec lequel on a parlé du futur de son frère en situation d'handicap.

C'est un peu ambivalent, si tu veux, parce que je ne veux pas lui imposer quoi que ce soit.

Daniel n'a pas choisi d'avoir un frère en situation d'handicap.

Alex non plus a choisi de naître comme ça.

Ce sont les hasards de la génétique qui ont voulu ça.

Mais je ne peux pas imposer à un jeune homme qui va avoir 20 ans dans quelques jours qu'il soit là toujours pour son frère.

Je ne sais pas ce que Daniel fera comme métier, où il sera, s'il aura une famille ou pas.

C'est un jeune homme qui, lui aussi, a le droit de vivre sa vie.

Je ne peux pas lui imposer quoi que ce soit.

Par contre, lui, il me l'a déjà dit.

« Ne t'inquiète pas, maman, je serai là pour Alex.

» Alors, bien sûr, il ne sera pas là au quotidien pour Alex.

Il ne va pas lui chercher son linge ou le sortir tous les jours pour aller acheter une friandise.

Ça, je le sais.

Mais il sera là peut-être pour veiller sur lui à distance.

Donc, par exemple, je sais et je lui fais entière confiance que lorsqu'on ne sera plus là ou qu'on ne sera plus en mesure de s'occuper du patrimoine d'Alex, Daniel prendra le relais.

Préparer son enfant pour la suite, c'est aussi le rendre plus indépendant, y compris, effectivement, Guylaine et la mère de Joseph.

Elle essaye de le préparer doucement à vivre hors du foyer familial, ce qui demande beaucoup d'anticipation.

La question très sensible, c'était mais qui va pouvoir lui donner toute son affection ? Comment on peut le faire ? Moi, je vois le cas de Joseph.

C'est un garçon qui, malgré ses 19 ans, est hypersensible, très attaché à son entourage.

Et je me dis, bon, voilà, qui va pouvoir l'aimer autant que nous on peut l'aimer ? C'est toute la question.

On fait en sorte qu'il se développe autour de lui des relations humaines importantes avec son entourage.

Il va falloir aussi qu'on passe le cap de le faire partir en vacances sans nous, par exemple.

C'est partie des choses qu'il faut travailler pour qu'il puisse se détacher un peu de notre lien affectif.

Là, les seules fois où il est parti sans nous, c'était soit dans la famille proche, soit au sein de son établissement.

Quelquefois, l'établissement organise ce qu'on appelle des transferts.

Pendant quatre, cinq jours, l'équipe d'encadrement de son institut les font partir en séjour.

Je me dis, maintenant, il faut qu'on passe à l'étape supérieure, c'est-à-dire qu'il parte vraiment une semaine, quinze jours, dans une sorte de camp de vacances adapté.

C'est aussi préparer assez rapidement l'autonomisation et le détachement.

Au début, on culpabilise beaucoup.

On a du mal, on se dit, comment ça va se passer ? Mais après, je pense qu'il faut vraiment franchir le pas et ça ne peut que les aider, même s'ils peuvent nous en vouloir au début.

Mais voilà, je pense qu'il faut le faire.

C'est la question de l'autonomisation.

Laura, comment ça se passe ? Tu prépares ton enfant à un éventuel avenir en foyer, par exemple ? Pour tout dire, nous ne sommes pas encore prêts à franchir le pas de l'internat, ce qu'on appelle aujourd'hui l'internat, c'est-à-dire un foyer ou une maison d'accueil spécialisée dans laquelle Alex sera accueilli 24 heures sur 24.

Par contre, effectivement, on travaille, disons, ce détachement affectif depuis quelques temps, depuis quelques années déjà, en envoyant Alex en sejour adapté, avec des organismes.

Alors oui, quand il part, Alex, on a toujours une petite, comment dirais-je, on est un peu hors sol.

C'est-à-dire que malgré les occupations de la journée, malgré, on vit notre vie quotidienne et on en profite aussi un peu, c'est-à-dire on fait des choses qu'en général, quand il est là, on ne peut pas faire, des petites sorties, des théâtres, des cinémas, etc.

Eh bien, on a toujours une petite, comment dirais-je, une petite lumière allumée quelque part dans la tête pour dire « Ah, mais à cette heure-ci, normalement, à la maison, il fait ça.

Est-ce qu'il fait la même chose là-bas ? » Et puis on dit « Non, non, mais ils vont s'en occuper.

Oui, mais s'il tombe, oui, mais s'il fait une fausse route, est-ce qu'ils seront s'en occuper comme il faut ? Est-ce qu'ils vont bien comprendre tous les signes qu'il fait ? » Donc on est tellement fusionnel avec notre enfant en situation d'handicap et de handicap lourd, c'est de ça qu'on parle, qu'effectivement, notre enfant est presque le prolongement de nous-mêmes.

Et donc, à un moment donné, c'est vrai que, pour notre bien psychologique, affectif, etc.

, et pour son bien psychologique, affectif, etc.

, il faut quelque part savoir dire qu'il est adulte, même s'il a besoin de soins, de suivi, d'aide au quotidien, dans les gestes de la vie quotidienne, il faut lui donner un petit peu d'autonomie.

Et donc s'autoriser de se mettre un petit peu en retrait et de le laisser faire sa vie, pour ainsi dire, avec tous les aléas, les défauts que cela comporte, parce que, bien sûr, qui l'accompagne n'est pas nous-mêmes.

Et donc on aura toujours une vision un peu critique de ce que les autres font.

Mais c'est comme ça.

Il faut faire confiance à notre enfant.

S'il y a vraiment un danger, etc.

, il saura comment le dire, il trouvera la manière de le dire et faire confiance aussi aux accompagnants qui prennent le relais pour un jour, une semaine, ou plus longtemps.

Camille, je te vois hocher de la tête.

C'est des questionnements que tu as, toi, j'imagine, avec les personnes qui rentrent dans ton bureau ? Oui, bien sûr.

Oui, oui, on entend souvent ce genre de réflexion.

Et oui, qui va pouvoir s'impliquer et prendre notre relais, voilà, pour un peu de répit, même alors que nous allons bien, ou pour plus tard, bien sûr.

La question du foyer, c'est pas toujours le bon timing, j'imagine, comment vous le gérez ? C'est-à-dire qu'une place en foyer n'arrive pas toujours au moment idéal.

Comment ça se passe avec les familles ? Il y a effectivement des délais d'attente, mais bon, voilà, c'est vrai qu'on trouve généralement une place en foyer au bout de quelques mois ou années, mais à peu près quand même au moment où la personne l'a décidée, à quelques mois ou années près.

En quelques années, c'est pas mal pour être prêt ou pas, mais.

.

.

Oui, mais ça, c'est très variable, d'une région à l'autre, du type de foyer à l'autre, c'est très variable.

Oui, c'est variable aussi en fonction de l'accompagnement nécessaire.

Juste pour l'anecdote, Alex a 22 ans, et il est encore en institution pour enfants.

Donc voilà, l'accompagnement dont Alex a besoin, il est complexe et on ne le trouve pas à tous les coins de rue.

C'est pour ça, c'est ce que j'essayais de dire, en fait.

Dire, on imagine un avenir dans un foyer, donc ça se prépare, ça on l'a compris, mais il faut aussi que le foyer arrive au moment où nous-mêmes, on est prêts, et qu'il n'y ait pas une forme de pression autour de ça, de dire, ben voilà, c'est maintenant, ou ça sera dans encore plusieurs années, et comment je vais faire ? Voilà, c'est un peu ce que j'essayais de.

.

.

Eh bien, en fait, quand l'enfant n'est pas en mesure de décider lui-même de son projet de vie, la famille rentre, disons, dans la danse, pour ainsi dire, et donc on construit tous ensemble le projet de vie familial et de la personne.

Et effectivement, la situation actuelle des établissements médico-sociaux pour adultes n'est pas en mesure, peut-être, de répondre dans le timing, disons, dans la temporalité et dans la qualité de l'accompagnement souhaité, et donc, par exemple, le projet de vie d'Alex est en train d'évoluer, parce qu'en fait, on pensait, pour Alex, à un externat, donc un milieu adulte, mais toujours un externat au moins pendant quelques années.

Là, on est déjà deux ans au-delà de la date limite théorique pour le passage à un foyer adulte ou dans un établissement adulte, et donc on est en train, peut-être, de revoir un peu son projet de vie et prendre un peu ce qui va être disponible.

Donc, de revoir son projet de vie au rabais, parce qu'en fait, il n'y a pas de place.

En fonction des structures.

Exactement.

Concrètement, quelles sont les possibilités en termes de tutelle ? Est-ce que tu peux nous faire un point un peu là-dessus, Camille ? Oui, alors, brièvement, il y a deux principales mesures de protection juridique historique qui sont la tutelle et la curatelle.

Depuis 2016, on a aussi l'habilitation familiale et de façon conventionnelle, on peut faire également un mandat de protection futur pour autrui.

Donc, la tutelle, elle est adaptée pour une personne qui a besoin d'être représentée pour tous les actes de la vie, que ce soit sur le plan matériel, médical, toutes les décisions à prendre.

La personne a besoin d'être représentée.

La curatelle, c'est une mesure d'assistance.

La personne en situation de handicap peut prendre seules des décisions qui n'ont pas de conséquences graves sur son patrimoine, sur elle-même.

Et le curateur va l'assister pour les décisions importantes.

L'habilitation familiale, elle, a deux niveaux.

La représentation et l'assistance, un peu comme la tutelle et la curatelle, mais elle est réservée aux familles.

Donc, seuls le conjoint, les frères et sœurs, les parents, les descendants, peuvent prendre en charge cette habilitation familiale qui est beaucoup plus légère que la tutelle et la curatelle.

À titre d'exemple, il n'y a pas besoin de rendre des comptes annuels ou de demander l'autorisation du juge des tutelles pour telle ou telle chose.

Et le mandat de protection future, c'est un petit peu différent, puisque la personne n'est pas protégée tant qu'il n'est pas déclenché.

Les parents disent, voilà, on aimerait que tel mandataire, tel ou tel, il peut y en avoir plusieurs, s'occupe de mon enfant lorsque nous ne pourrons plus le faire.

Donc, parce que nous serons malades ou nous ne serons plus là.

Et voici de quelle façon nous aimerions qu'il prenne en charge notre enfant ou qu'il gère ses affaires.

On aimerait qu'il vive à tel endroit, qu'il dispose de tant de revenus provenant de telle épargne.

C'est un mandat qui permet vraiment de donner des grandes lignes, des grandes orientations sur la façon dont on prendra en charge l'enfant, de sa personne et de ses biens.

Mais il ne se déclenche donc que quand les parents ne peuvent plus s'en occuper.

Donc la personne n'est pas protégée.

Mais ceci dit, on peut faire un mandat de protection futur, même s'il y a déjà une tutelle ou une kiratelle, une habilitation familiale.

Ça peut prendre la suite.

D'accord.

Oui, justement, une question peut-être qui peut intéresser les familles qui écoutent.

Nous, par exemple, nous avons mis en place un système d'habilitation familiale générale.

Mon mari et moi, nous sommes habilités à gérer et à représenter notre fils.

Est-ce qu'on peut alors mettre en place un système de protection future pour désigner le frère d'Alex, pour nous remplacer, disons, quand on ne sera plus en mesure de représenter et de nous occuper des affaires d'Alex ? Comment ça se passe, en fait, les générations qui se suivent pour justement représenter la personne en situation de handicap s'il y a une cohésion familiale qui le permet, bien entendu ? Oui, le mandat de protection future prime sur les autres mesures.

Donc, c'est bien lui qui va s'appliquer si l'habilitation familiale tombe ou parce que vous n'êtes plus habilité.

Cependant, le juge a quand même le droit d'intervenir s'il estime que ce n'est pas suffisamment protecteur.

Vous pouvez aussi, dans un testament ou par un courrier au juge, dire que vous souhaitez qu'un tel prenne la suite dans le cadre d'une habilitation familiale puisque, en l'occurrence, le frère d'Alex pourrait l'assurer ou, du coup, il y a le mandat de protection future pour autrui.

Est-ce que ça crée des conflits, parfois, dans ton bureau, des conflits familiaux ? Parce que, déjà, penser au présent, ce n'est pas toujours évident dans les familles.

Alors, le futur, j'imagine que ça peut créer des difficultés.

Alors, si on anticipe, généralement, ça ne crée pas de difficultés parce qu'effectivement on ne peut pas l'imposer.

Donc, il faut vraiment que ce soit un choix des proches de s'impliquer sinon il faut faire appel à des professionnels.

Des mandataires à la protection des majeurs, par exemple, à des associations, voilà, des professionnels.

Parce que quand les familles sont éclatées, est-ce que, je ne sais pas, la justice peut avoir un mot à dire ? Moi, je n'ai aucune idée de comment ça se passe.

Quand la famille ne peut pas assurer une mesure de protection juridique, ce sont effectivement des associations ou des MJPM professionnels, donc des personnes qui gèrent ça de façon libérale, qui vont s'en charger.

Tu le vois à l'AFSA, toi, des situations où, justement, il n'y a pas de cohésion familiale et où ces questions-là créent des tensions ? Oui, parfois on le voit.

Alors, en général, c'est vrai que nous avons des situations plutôt, je ne sais pas si c'est le mot, mais traditionnelles, plutôt classiques, dans lesquelles, effectivement, même dans le cas de familles séparées ou de divorces, etc.

, c'est le bien de l'enfant en situation de handicap, de ses frères et sœurs, s'il y en a, qui prime.

Et donc, les parents, disons, travaillent en bonne intelligence pour faire en sorte que tout le monde soit épanoui et que les décisions prises soient vraiment adaptées à la situation.

Nous avons effectivement aussi, malheureusement, quelques situations un peu plus complexes où les parents, le père et la mère, ne sont pas d'accord, même avant, disons, les 18 ans d'un enfant, sur les décisions à prendre en termes, par exemple, éducatifs, de lieu d'habitation, etc.

Donc, j'imagine, je ne connais pas en détail ces situations parce que c'est de l'ordre du privé, ça va au-delà de ce qu'on peut se dire aussi dans le milieu associatif, mais à ce moment-là, effectivement, j'imagine que le juge doit intervenir pour ou bien confier à d'autres personnes, à des tiers, à des professionnels, comme le disait Camille, la représentation de l'enfant, qu'il soit mineur ou majeur, et pour que le bien de l'enfant prime sur les intérêts des parents.

Autre source potentielle de tension, c'est la question de la répartition du patrimoine dans le futur.

J'aimerais qu'on en discute aussi.

Il faut bien se renseigner, bien anticiper, aller voir une conseillère en gestion de patrimoine.

Il y a des bons trucs à savoir à ce niveau-là ? Par exemple, est-ce qu'il vaut mieux investir dans un bien qui va permettre d'avoir une rentrée d'argent grâce à une location ou pas ? Qu'est-ce que tu conseilles aux familles de manière générale ? Toute situation est vraiment différente et particulière, mais souvent, on se rend compte que l'intérêt de la personne en situation de handicap n'est pas forcément le même que ses frères et soeurs, qui, eux, vont avoir besoin de ressources, qu'elles soient imposables ou non imposables, peu importe, à des limites, ou de biens immobiliers.

La personne en situation de handicap, si elle est en foyer, un bien immobilier, qui plus est locatif, n'a aucun intérêt pour lui.

Et si on ne fait rien, les enfants vont hériter de la même chose et vont être en indivision.

Donc, on voit bien que les frères et soeurs vont finalement subir un petit peu les contraintes liées à la situation de handicap de leurs frères ou soeurs.

Du coup, il faut organiser cette transmission de sorte, idéalement, que la personne en situation de handicap reçoive des biens bien distincts, qu'il soit autonome sur son patrimoine.

Et, alors, généralement, s'il est en foyer, finalement, la chose la plus simple et qui va lui servir de façon la plus efficace possible, ça va être tout simplement un contrat d'assurance-vie épargné handicap.

Si on ne fait rien et qu'un enfant handicapé hérite de biens immobiliers en indivision avec ses frères et soeurs, voire le conjoint survivant, qu'il est en foyer, le département va pouvoir hypothéquer, va même hypothéquer les biens immobiliers ou un bien immobilier de façon à s'assurer le remboursement de l'aide sociale à l'hébergement ou d'essai de la personne handicapée.

Donc, on voit bien que ça va créer des problèmes si le conjoint survivant veut vendre le bien, par exemple.

Si un bien procure des revenus locatifs, ça va lui baisser, voire supprimer son AH.

Et en plus, il va participer à l'aide sociale à l'hébergement.

Donc, ça n'a pas d'intérêt pour lui, en tout cas, si le souhait des parents était de procurer des revenus complémentaires.

Donc, ces exemples montrent qu'il est vraiment important que la personne handicapée ait une épargne ou un patrimoine bien adapté pour elle.

Si la personne peut vivre de façon autonome, elle peut tout à fait avoir sa résidence principale.

Ça, ça a du sens.

Mais il ne faut pas qu'elle ait des biens qui n'aient pas d'intérêt pour elle.

Donc, il y a des placements qui existent, qui sont adaptés ? Oui, spécifiques.

Alors, le fameux contrat d'épargne handicap que j'ai mentionné, lui, il est toujours adapté.

Quelle que soit la situation, c'est tout simplement une assurance vie classique sur laquelle on met une option épargne handicap.

Alors, ça s'adresse uniquement aux personnes handicapées qui peuvent prouver qu'elles ne peuvent pas travailler dans des conditions normales de rentabilité, donc qui ont plus de 16 ans et qui ne sont pas encore à la retraite.

Donc, l'argent va capitaliser, créer des intérêts au sein de ce contrat sans impact sur la H puisqu'il n'y a pas d'intérêt imposable.

Et cette épargne capitalisée n'est pas présente en compte non plus par le département pour la participation aux frais d'entretien et d'hébergement.

Quand la personne en a besoin, elle va retirer.

Alors, idéalement, après huit ans, pour qu'il n'y ait aucun effet sur la H.

Alors, après, si elle a besoin de retirer avant huit ans, on trouve des solutions tout de même.

Après huit ans, très facilement, ça va lui créer des revenus complémentaires sans aucun impact sur ses aides sociales.

On peut également mettre en place une rende qui va lui s'ajouter aux revenus, même s'il est en foyer d'hébergement.

Le capital à son décès va être transmis à ses frères et sœurs dans le cadre de l'assurance vie.

Et donc, dans la majorité des cas, sans aucune fiscalité.

Alors que, si on lui transmet un patrimoine, et à son décès, ce patrimoine est transmis à ses frères et sœurs, il y a une taxation de 45% après un tout petit abattement.

Donc, il y a une vraie déperdition du patrimoine familial.

Voilà.

Donc, oui, il vaut mieux organiser les choses, vous voyez.

Organiser, c'est aussi anticiper les besoins.

Parce qu'en fait, les besoins vont évoluer avec l'âge de la personne.

Ça, c'est quelque chose auquel on réfléchit aussi de manière générale.

Quand on pense à son enfant qui a 20 ans aujourd'hui, mais qui en aura 20, 50, 60, 70, qui va avoir des besoins d'une personne âgée aussi plus tard.

Vous arrivez à voir venir aussi loin ? Parce que ça paraît compliqué.

En termes de, est-ce que mon enfant aura suffisamment d'argent pour toute sa vie, quoi ? Est-ce que tu as des réponses à donner aux familles immédiatement ? Non, mais ce qu'il faut, c'est avoir un patrimoine qui puisse être flexible et adaptable.

D'accord.

Qui puisse évoluer.

Tout à fait.

Merci beaucoup.

L'épisode touche à sa fin.

Merci à Lara, merci à Camille pour vos présences.

Pour aller un peu plus loin, je vous conseille d'ailleurs d'aller voir les articles publiés par toi, Camille, sur le Média en direct.

On va vous mettre les liens en description de l'épisode.

Merci à vous de nous écouter.

N'hésitez pas à partager l'épisode et en parler à celles et ceux que cela pourrait intéresser.

Merci aussi aux aidantes et aux aidants qui épisode, après épisode, témoignent dans la Voix des Aidants.

Merci enfin à Anne et Stel qui ont participé avec moi à la préparation de cet épisode.

De mon côté, je vous dis à bientôt.